Manioc

Le manioc Manihot esculenta appartient au genre Manihot et à la famille des Euphorbiacées. C'est une plante tropicale originaire d'Amazonie qui est cultivée pour ses tubercules nourrissants.

Le manioc était cultivé de longue date en Amérique latine. Les Portugais découvrent le manioc au Brésil à la fin du 16e siècle, puis le diffusent dans leurs colonies en Afrique et en Asie. Les Espagnols introduisent ce légume-racine aux Philippines au 19e siècle. C'est à partir de là que le manioc atteint la Mélanésie et l'Australie à la fin du 19e siècle (1).

Aujourd'hui, le manioc est la base de l'alimentation de plus de 400 millions de personnes dans le monde. Selon la FAO, la production mondiale atteignait 315 millions de tonnes en 2021 (1).

Ce tubercule a été introduit de Tonga en Nouvelle-Calédonie en 1852 par un missionnaire dénommé Collins. Au cours de l'année qui suivit la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie (1953), le commandant Edmond de Bovis du navire "Le phoque" en importa de Tahiti. La mission catholique de Balade (nord-est de la Grande Terre) fût le centre de propagation de cette nouvelle culture. De nouvelles variétés ont été introduites en 1870 par des colons réunionnais (2). Le manioc fait aujourd'hui pleinement partie des cultures vivrières, car il est rustique, facile à cultiver, se récolte une bonne partie de l'année et résiste à des conditions difficiles. La culture du manioc est courante dans les champs traditionnels, mais son tubercule est relativement peu consommé. Les plantes persistent dans les champs abandonnés (3).

Il existe 25 variétés de manioc en Nouvelle-Calédonie, conservées en collection au centre des tubercules tropicaux (4).

Le manioc est un tubercule nourrissant. On peut également en consommer les feuilles.

Toxicité

Certaines variétés contiennent un composé toxique, du cyanure d'hydrogène (HCN) qui se forme par une réaction enzymatique lorsque la plante est blessée, lors de la découpe de la racine par exemple(5).

• Le cyanure d'hydrogène s'évapore à 25°C
• La cuisson rend la feuille et le tubercule consommables.

Préparations culinaires

Le manioc peut être cuit et préparé de diverses façons :

• Au bouillon ou à la vapeur. Bien jeter l'eau de cuisson qui récupère le cyanure d'hydrogène.
• En frites
• Fécule (tapioca)
• Semoule
• Découvrir de délicieuses recettes dans "Les récoltes du Caillou" (6).

Qualités nutritionnelles  :

• Le tubercule est riche en glucides, en fibres, en vitamine C, en potassium (5).
• Les feuilles sont riches en vitamine A.

Vertus médicinales

• Favorise le transit intestinal et soulage les irritations du côlon.
• Permet de lutter contre la constipation et la diarrhée.

Allure

• Arbuste à durée de vie courte pouvant atteindre 7 m de hauteur (2).
• Tronc robuste, ramifié parfois à l'apex et gardant la cicatrice des feuilles
• Une ou plusieurs tiges se développent simultanément sur la bouture

Feuilles

• Disposées en spirale,
• Palmées avec 3 à 9 lobes profonds qui sont ovales ou lancéolées, verts ou teintés de rouge et qui mesurent 4-20 cm x 2-6 cm (2).
• Le nombre de lobes peut évoluer au cours du temps : faible au début, au maximum vers le 3e à 6e mois et enfin unique à la fin (5).
• Pétiole vert ou rouge mesurant 5 à 30 cm de longueur.

Fleurs

• Espèce monoïque (un sexe par fleur).
• Calice à 5 lobes triangulaires.
• Inflorescences avec les fleurs mâles au sommet et des fleurs femelles plus larges. (2)

Fruits et graines

• Fruit globulaire de type capsule mesurant 1,5 cm de long et portant 6 ailes fines.
• La capsule libère 3 graines qu'il éjecte en explosant 3 à 5 mois après la polinisation (2).

Racines, tubercule

• Le tubercule se développe par un renflement des racines secondaires, à proximité de la tige principale
• Il peut atteindre 1 m de longueur et 10 cm de diamètre
• Épiderme lisse ou rugueux, brun, blanchâtre, rose ou rouge.
• Cortex sous-épidermique fin, blanc, parfois teinté de rouge ou de brun
• Chair blanche, jaune, ou veinée de rouge (2)

Cycle court de 12 mois

• Septembre à novembre : plantation recommandée (4)
• Avril à août : Récolte des tubercules
• Juillet-août : période de repos végétatif de la plante pendant les mois les plus froids. Elle qui peut perdre ses feuilles (3).

Cycle de 18 mois

• Septembre à novembre : plantation recommandée
• Avril à février : Récolte des tubercules
• Pour les cycles de 18 mois intégrant une période de saison chaude, les rendements peuvent être importants. Toutefois, les risques de dommages par les rats sont importants. De plus, les tubercules deviennent plus fibreux et leur qualité gustative diminue (4).

Les variétés se distinguent par leurs caractéristiques morphologiques. On distingue les variétés-cultivars :

• à cycles courts qui arrivent à maturité en 6 mois et se conservent 9-10 mois dans le sol. Ils ont plutôt une chair douce.
• à cycles longs qui arrivent à maturité au bout d'un an et dont certains se conservent dans le sol 3 à 4 ans (2). Ils ont plutôt une chair amère.

En Nouvelle-Calédonie, les 3 variétés qui ont les meilleurs rendements selon le centre des tubercules tropicaux de l'Adecal-Technopole sont les suivantes :

Farine, CTT 05

• Variété locale
• Mesure environ 3,15 m de hauteur
• 17 tubercules produits par pied ayant un poids total de 4,5 kg
• Tubercule en position horizontale dans le sol. Il a une forme conique, une peau marron clair et lisse. Chair blanche juste après la coupe.
• Quantité de cyanure d'hydrogène (HCN) : 58 mg/kg
• Premières feuilles vert foncé. Chaque feuille a 7 lobes foliaires. Le pétiole mesure 15,2 cm et il est de couleur rouge.
• Tige grise

Hébrides, CTT 40

• Variété locale
• Mesure environ 2,85 m de hauteur
• 8 tubercules produits par pied ayant un poids total de 3,8 kg
• Tubercule en position horizontale dans le sol. Il a une forme cylindrique, une peau marron foncé et rugueuse. Chair blanche juste après la coupe.
• Quantité de cyanure d'hydrogène (HCN) : 88,5 mg/kg
• Premières feuilles vert clair. Chaque feuille a 3 lobes foliaires. Le pétiole mesure 15,6 cm et il est de couleur vert et rose.
• Tige grise

Béga, CTT 59

• Variété introduite
• Mesure environ 2,75 m de hauteur
• 5 tubercules produits par pied ayant un poids total de 1,8 kg
• Tubercule en position intermédiaire dans le sol. Il a une forme conique, une peau marron foncé et rugueuse. Sa chair est jaune pâle juste après la coupe.
• Quantité de cyanure d'hydrogène (HCN) : 88,5 mg/kg
• Premières feuilles vert clair. Chaque feuille a 5 lobes foliaires. Le pétiole mesure 7,6 cm et il est de couleur rouge sur le dessus.
• Tige de couleur marron pâle.

La quantité de maniocs commercialisés sur les marchés néo-calédonien est globalement assez faible. Elle a été en moyenne de 36,7 tonnes chaque année au cours de la décennie 2012-2022.

Reproduction sexuée

• Le pouvoir germinatif des graines est faible (environ 20%).
• L'index de récolte des tubercules est plus faible par cette méthode que par la technique du bouturage

Reproduction végétative

Le mode de propagation en culture se fait par la bouture de tige (2).

• Une bouture produit plusieurs racines au niveau des nœuds en contact avec le sol humide et à la base (plus nombreuses)
• Boutures à prélever pendant la phase de repos sur des plants sains
• 25 à 30 cm de long (5 à 7 nœuds) à prélever sur la partie centrale brunes âgées de 12 mois
• 2 à 3 cm de diamètre
• Évitez la tige verte et tendre, car elle peut sécher facilement.
• Afin d'assurer une reprise homogène, récoltez les tiges une semaine avant la plantation et les conserver à l'ombre dans un endroit bien aéré, puis découpez vos boutures la veille ou le jour de la plantation.
• Lorsque la bouture est coupée en biseau et plantée en oblique cela permet un regroupement des racines sur un même secteur, ce qui facilite la récolte.
• Une coupe droite avec une plantation verticale donne de racines en rayon autour du plant.

Le manioc est une plante facile à cultiver, peu exigeante qui supporte les grandes chaleurs et les périodes de sécheresse prolongées. Toutefois, la qualité et la quantité de tubercules produit dépendra de la qualité du sol, de l'ensoleillement et de la pluie (3).

Exigences environnementales

• Soleil, mais tolère l'ombre et la mi-ombre (4).
• Température minimale 12°
• Taux maximal de croissance à des températures maximales de 25 à 29°C.
• Ne résiste pas au gel (2)

Sol

• Tout type de sol
• La butte ou le billon évite l'engorgement du sol et concentre la couche humifère dans la partie supérieure (5).
• Intéressant pour apporter de l'ombre dans le potager, servir de tuteur à d'autres plantes (haricots) ou encore de haie brise-vent.

Plantation

• Prévoyez de planter plutôt une parcelle importante en septembre puis d'échelonner vos récoltes l'année suivante, plutôt que d'échelonner la plantation (4).
• Se fait sur sol humide
• Faites attention de bien planter vos boutures à l'endroit
• Plantez-les en position oblique ou à l'horizontal à une profondeur de 2-3 cm.
• Pour un sol argileux, placez la bouture à l'horizontal entre 4 et 15 cm de profondeur (2)
• Le nombre de racines est faible quand la bouture est de mauvaise qualité.
• Chaque racine peut accumuler de l'amidon sur un secteur est devenir un tubercule
• 1 m x 1 m = 10 000 plants par Ha
• 1,40 m x 0,7 m = 10 204 plants par Ha

Nutrition, fumure

• Apports de fond avant la plantation
• Apports fractionnés sur les 4 à 5 premiers mois de la culture
• Réduction progressive des doses d'azote sur les derniers apports (5)
• 30 à 60 kg d'azote en évitant l'excès de potassium, sinon les parties aériennes se développent au détriment des tubercules (4).
• 60 à 300 kg de potassium KCl
• 20 à 40 kg d'acide phosphorique

Eau et irrigation

• Bonne tolérance à la sécheresse
• Racine sensibles à l'excès d'eau
• En cas de stress, les réserves du tubercule aident la plante à repousser

Entretien

• Le sol est entièrement couvert au bout de 3 mois pour 10 000 plants/ha
• Un à trois sarclages manuels sont nécessaires
• Lutte contre les adventices par le choix de floraisons précoces, culture associée, densité de population
• Désherbage dès 3-4 semaines après la plantation, puis répétition au cours des semaines 8 et 12, puis 20 et 24.
• Traitements chimiques rares

• 12 000 plants / ha en système traditionnel (2)
• 10 000 à 20 000 plants / ha en système intensif
• 90 tonnes de tubercules par ha et par an (3)
• Un rendement frais de 50 t est atteint en un an derrière un défrichage.

Récolte

• Manuelle et échelonnée.
• Ajustée à la quantité destinée à être commercialisée.
• Elle comprend la coupe des plants aériens et l'arrachage des tubercules.
• Elle se fait 10 à 12 mois après la plantation de la bouture (4).

Conservation

• Produit qui se conserve mal à l'air frais. La conservation est possible lorsque les tubercules sont enterrés avec de la sciure humide.

Cyclones

• Pensez à sectionner les tiges avant le passage d'une cyclone qui renverse facilement les plants et les fait pourrir en quelques jours (2).
• Si vos plants ont été défoliés lors d'un cyclone, vous devrez récolter les tubercules rapidement, car les racines deviendront inconsommables dès que les plants vont repousser.

Peu de problèmes sanitaires.

Les principaux prédateurs sont les rats et les cochons sauvages.

Le manioc est une plante robuste, rustique facile à cultiver qui nécessite peu d'entretien.

Sa culture permet de récupérer des sols affaiblis et termine souvent l'assolement du jardin, juste avant la jachère.

Dans une ville comme Nouméa, elle est plantée en bord de route sur des sol peu préparés.

Cette fiche a été réalisée grâce au soutien financier de l'Agence rurale dans le cadre de son appui au développement de la filière « Plantes comestibles, fruits et légumes de diversification ».

L'Agence rurale et l'Institut agronomique néo-calédonien ont signé une convention de partenariat en juin 2024 pour la réalisation et intégration d'une trentaine de fiches techniques variétales dans Agripedia. L'objectif est ainsi de contribuer à l’amélioration de la couverture alimentaire du pays en proposant des produits locaux originaux, de qualités nutritionnelles et environnementales remarquables et adaptés aux conditions pédoclimatiques de la Nouvelle-Calédonie.

L'équipe d'Agripedia et l'IAC remercie l'Agence rurale pour ce précieux soutien !

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