La culture du papayer
Description
Originaire d'Amérique tropicale, le papayer a été introduit dans l'archipel vers 1845. Il s'agit d'une plante non lignifiée de la famille des Caricacées. Elle a une croissance rapide et une courte durée de vie. Elle peut atteindre une hauteur de 3 à 7 m. Le papayer a une racine pivotante d'au moins 50 cm.
Les fleurs sont situées à l'aisselle des feuilles. Les fruits sont insérés en grappe sur le tronc. Ce sont de grosses baies arrondies ou ovales avec une peau lisse et verte qui devient jaune-orangée à maturité. La chair est épaisse avec une couleur variant du jaune au rouge selon la variété. La cavité centrale enferme de nombreuses petites graines noires recouvertes de mucilage.
Le papayer a 3 types sexuels :
- le plant mâle qui ne donne pas de fruits. Ses fleurs sont en grappe et comportent des étamines.
- le plant femelle donne des fruits arrondis comestibles. Ses fleurs présentent un pistil.
- le plant hermaphrodite donne des fruits ovales exportables. Ses fleurs présentent un pistil et des étamines. Ces fleurs sont ensachées afin de provoquer l'autofécondation et d'empêcher toute pollinisation extérieure.
Apres la nouaison, le sachet est ouvert et le fruit se développe. De ce dernier a maturité, les graines sont extraites puis séchées. Elles seront alors bonnes pour le semis durant 3 mois.
Exigences du papayer
Le climat
Le papayer nécessite un climat chaud. La température idéale semble être entre 22 et 26°C. Des températures plus faibles donnent des fruits sans saveur. Une température de 0°C est létale et une température supérieure à 30°C peut engendrer des dégâts sur la plante. Il est très exigeant en eau mais supporte mal les inondations et l'eau stagnante, de même qu'une exposition trop importante au vent (nécessité de prévoir des brise-vent cf. fiche technique 4.3).
2.2. Choix des sols
Le papayer nécessite un sol léger bien drainant et profond du fait de sa racine pivotante. C'est pour cette raison qu'il se développe particulièrement bien sur les sols du bord de la côte Est et des îles Loyauté. Le volume de sol peut être augmenté en confectionnant des ados (gros billon s) .C'est une plante qui demande un sol riche en matière organique et en calcium.
Un pH entre 5.5 et 6.5 est recommandé mais il est cultivé avec succès à des pH plus élevés (cas des îles Loyauté).
Choix des variétés
Plusieurs variétés sont présentes sur le Territoire. Il existe une variété locale avec de nombreuses différenciations de fruits dues à l'hybridation. En raison du transport et de la commercialisation, les variétés dites améliorées qui présentent une peau épaisse, un goût assez aromatisé et une couleur de la pulpe orange ou rouge, sont recherchées.
Elles sont pour la plupart du type hawaïen et appartiennent à la lignée "Solo".
- Sunrise : variété de type Solo. Le poids du fruit est de 250-400g, la chair est orange-rouge.
- Sunset : hybride de Solo n°9 et de Kariya, le poids du fruit est de 350-400 g, la pulpe est rose-saumon, la productivité est élevée, et on note une certaine résistance à l'anthracnose.
- Waïmanalo : hybride de Solo n° 5 et de Betty, la pulpe est jaune, le fruit plus gros que les deux précédentes variétés avec un poids de 500-600 g, la productivité est moins élevée.
Il existe également des sélections originaires de Taïwan qui se caractérisent par des fruits de poids moyen très élevé pour la commercialisation.
- Tainung N° 1 : les plants sont vigoureux et prolifiques. Le fruit est très allongé avec un poids d'environ 1 kg. La chair est rouge.
- Known You N° 1 : les plants sont vigoureux avec un rendement important et une fructification rapide. Les fruits à chair jaune sont gros et allongés, et pèsent entre 1,6 et 3 kg.
Techniques culturales
4.1. Multiplication
La multiplication se fait par semis. Les graines perdent leur pouvoir de germination au bout de 3 à 4 mois. Elles ne doivent alors plus être semées. Le semis s'effectue en pochon à raison d'une graine par pochon. Il est conseillé d'utiliser des pochons de 20x20 cm. La germination se fait dans les 15 jours qui suivent le semis. Les plants restent en pépinière jusqu'au stade 30 cm, taille à laquelle ils sont replantés en pleine terre.
4.2. Cycle de production
Les premières fleurs apparaissent 3 à 4 mois après la mise en place, et les premières récoltes s'effectuent environ 8 mois après la plantation. L'intervalle entre la nouaison et la récolte peut varier de 130 jours (4 mois) à 210 jours (7 mois). On observe les durées de cycle les plus longues lorsque les fruits sont noués en hiver. En culture intensive, le papayer est gardé 2 ans sur la parcelle. Au delà, la récolte est difficile. Ainsi, après cette durée, soit ils sont arrachés soit ils sont recèpés.
4.3. Rendement
Les essais conduits à la S.R.F.P. depuis 1999 permettent d'obtenir des rendements respectivement de
70 à 120 tonnes/ha/15 mois pour Waimanalo et Sunset.
4.4. Préparation du terrain
4.4.1. Préparation mécanique
Elle doit être réalisée sur terrain sec :
- épandre la fumure de fond,
- faire un sous-solage profond (80 cm),
- passer un outil de surface type cover-crop sur 15-20 cm,
- confectionner des ados (au moins 80 cm de hauteur) au moyen d'une charrue à soc.
4.4.2. Préparation non mécanisée
- 3 semaines avant trouaison, on peut appliquer un désherbant systémique : glyphosate à raison de 50 à 150 ml de produit pour 10l d'eau et 100g d'urée,
- faire un trou de plantation profond 60x60x60 cm et confectionner une butte de 60 cm de hauteur car le papayer a une racine pivotante d'au moins 70 cm,
- mélanger la fumure de fond,
- reboucher le trou.
NB : la préparation du terrain doit se faire au minimum· 1 mois avant plantation.
4.4.3. Brise-vent :
Planter des brise-vent tout autour de la parcelle au moins un an avant la plantation des papayers. Respecter un intervalle de 1 m entre chaque plant.
4.5. Densité de plantation
Il est possible de planter en double rang, comme dans le cas des bananiers, avec des écartements de 2 m entre plants sur le rang et, entre rangs et 4 m entre doubles rangs ce qui représente une densité de 1667 plants/ha. Ce dispositif permet une mécanisation de la culture et facilite la récolte. En situation non mécanisée, il est possible de planter à des écartements de 2 m en tout sens, ce qui. représente une densité de 2 500 plants/ha.
4.6. Fumure de fond
Celle-ci est calculée au cas par cas par l'analyse de terre, il n'y a pas de fumure de fond standard.
4.7. Plantation
Les plants doivent être transportés en véhicule bâché pour éviter les dégâts du vent et du soleil. Si les plants sont stockés en attente d'être plantés, les mettre à l'ombre et les arroser quotidiennement. Il est recommandé de planter en juillet-août, d'installer le système d'irrigation au moment de la plantation et de pailler les jeunes plants. Après plantation, il faut arroser copieusement chaque plant pour chasser l'air contenu dans le sol fraîchement remué.
Entretien des plantations
5.1. Désherbage
5.1.1 Chimique
La présence de mauvaises herbes autour de papayer concurrence fortement celui-ci pour l'eau et la fertilisation. Glyphosate 360g/I, 100 ml de produit commercial pour 10l d'eau (ajouter 100g d'urée pour augmenter l'effet herbicide). Pour contrôler l'enherbement entre 2 applications de glyphosate, on peut pulvériser du fluazifop-p-butyl à raison de 10 ml pour 10 L d'eau. Il est nécessaire d'utiliser un cache pour tout traitement herbicide.
5.1.2. Naturel et manuel
Un paillage épais (10 à 15 cm) permettra de contrôler efficacement l'enherbement. Il faut éviter d'utiliser la paille de case (Imperata cylindrica). Il suffira alors de passer de temps en temps pour retirer les quelques mauvaises herbes qui pourraient subsister.
Remarque : ce paillage permettra également de préserver une meilleure humidité du sol et limitera l'évaporation due au vent.
5.2. Fertilisation d'entretien
Dans le cas des sols des îles Loyauté où le phosphate y est présent et la potasse déficiente, il faut apporter par mois et par plant 50 g de nitrate de potasse de 1 à 6 mois. Puis le double de 7 à 12 mois et le triple au delà. Sur la Grande Terre ces quantités sont diminuées d'une moitié qui est remplacée par du nitrate de calcium.
5.3. La taille
Dans le cas d'une fertilisation azotée excessive on observe le démarrage de ramifications. Le travail de taille consiste donc à les enlever car elles produiraient des fruits de petite taille et non commercialisables.
5.4. Irrigation
Les besoins du papayer sont estimés à 0,6 ETP avec une irrigation par goutte à goutte. Le papayer est très sensible à la sécheresse et un stress hydrique se traduit par une absence de fructification. Les besoins varient de 50 à 120 mm par mois, selon l'époque. En l'absence de système d'irrigation, un apport hebdomadaire de 50 à 100l d'eau par arbre adulte est conseillé. Attention aux sols trop drainants tels que les sols sableux.
Protection phytosanitaire
6.1 Les maladies Oïdium
6.1.1 Symptômes sur feuilles :
Sur la face supérieure des jeunes feuilles, des décolorations sont observées. Elles donnent un aspect de mosaïque jaune pâle et vert au limbe. Sur la face inférieure, une poudre blanche-grise est présente en taches irrégulières sur tout le long des nervures.
6.1.2 Symptômes sur fruit
L'oïdium provoque des croûtes d'aspect liégeux gris-brun superficielles recouvrant la surface du fruit par taches.
6.1.3 Traitement
Une lutte chimique est recommandée en cas d'attaque en alternant les produits suivants :
- Soufre en émulsion à 60%, 40 ml/10 1 d'eau, ce produit est également acaricide et n'a aucun délai de récolte. Attention, il ne faut pas utiliser le souffre aux heures chaudes à 1 cause du risque de brûlures et ne pas le mélanger avec les huiles blanches.
6.2 Anthracnose
6.2.1 Symptômes
Ils apparaissent sur les fruits (Photo 3) à l'extrémité du tronc à la base des tiges. Le champignon se manifeste par de grandes taches brunes marquées de plis concentriques sur lesquels peut se développer un champignon rosé. Cela peut entraîner la chute des feuilles, la pourriture et la chute des fruits.
6.2.2 Traitement
idem que pour le "Black spot".
6.3 Maladie des taches noires ou "black spot"
6.3.1 Symptômes sur feuille
A la face supérieure, on observe des petites taches arrondies de 2 à 3 mm de diamètre marrons sur le pourtour et grises au centre. Ces tâches peuvent coalescer et provoquer un léger jaunissement du limbe. A chacune de ces petites taches, correspond à la face inférieure des feuilles, une petite pustule noire déprimée avec une petite ponctuation grise en son centre.
6.3.2 Symptômes sur fruits (Photo 4)
Des petites taches avec un aspect gras, d'environ 0,5 mm de diamètre sont observées surtout autour du pédoncule du fruit. Elles présentent en leur centre une légère ponctuation brune. Ces taches peuvent atteindre 2 mm de diamètre, on voit alors des petites fructifications noires qui recouvrent une lésion lui donnant un aspect de pustule.
6.3.3 Traitement
Des pulvérisations foliaires avec des produits à base de cuivre permettront d'enrayer la maladie.
6.4 Dépérissement dû à Phytophthora sp.
6.4.1 Symptômes
Le feuillage prend une coloration vert pâle puis vert jaune avant le flétrissement brusque des feuilles terminales et du bourgeon apical, suivi du dépérissement total du plant (Photo 5). Ce symptôme se développe durant la saison des fortes pluies sur des sols lourds ou insuffisamment profonds (cf. 2.2. Choix des sols).
6.4.2 Traitement
Si le sol n'est pas un facteur limitant il est possible de contrôler les dégâts par des traitements mensuels avec :
- ALIETTE (foséthyl-AI 80%) 25 g/10l d'eau en pulvérisation foliaire,
6.5 Papaya Ringspot Virus (PRV) :
Il s'agit d'une très grave maladie virale sévissant en Australie et à Hawaï mais qui n'est pas présente dans l'archipel. Elle se caractérise par une diminution de la production et la mort de la plante. Les symptômes sont plus visibles en saison fraîche.
6.5.1 Symptômes sur feuilles
La croissance est réduite et les feuilles jaunissent avec des taches en mosaïque entre les nervures. Des tirets vert foncés longitudinaux apparaissent sur les pétioles et la tige principale.
6.5.2 Symptômes sur fruits
Des taches caractéristiques circulaires et concentriques sont visibles sur les fruits (Photo 6).
6.5.3 Traitement
Il n'y a aucun traitement contre cette virose transmise par pucerons vecteurs à partir de plantes hôtes que sont principalement les cucurbitacées. Les techniques de lutte consistent à détruire les parcelles infestées afin d'éliminer les vecteurs et le réservoir de plants infectés. La recherche hawaienne a mis au point des variétés génétiquement modifiées résistante.s, mais dont la diffusion est interdite hors des U.S.A.
6.6 Les ravageurs
6.6.1 Acariens
Le papayer est particulièrement sensible aux attaques d'acariens qui surviennent durant les périodes sèches. D'une part le Tarsonème polyphage [Polyphagotarsonemus latus (Ewing)] :
Symptômes sur feuilles
Ces acariens invisibles à l'oeil nu, provoquent un jaunissement et une déformation des feuilles dont il ne reste plus que les nervures prenant l'aspect d'une "patte-d'oie" (Photo 7)
Ils peuvent alors détruire le bourgeon terminal, ce qui entraîne la mort du papayer.
Symptômes sur fruits
Lorsque les fruits ont pu se développer, ils sont petits et déformés couverts de plaques grises. D'autre part, l'Acarien rouge des Agrumes [Panonychus cftri (McGregor)] :
Symptômes sur feuilles
Ces acariens visibles à l'oeil nu entraînent une décoloration du feuillage qui prend un aspect vert-gris métallique.
Symptômes sur fruits
Les fruits sont recouverts de plaques grises et brunes.
Traitement
Il faut effectuer un traitement dès la pépinière à un rythme mensuel. On peut utiliser :
- soufre en émulsion à 60%, 40 ml/10l d'eau, à éviter durant la saison chaude.
Récolte-conservation
Pour le marché local, les papayes peuvent être récoltées lorsqu'elles sont entièrement jaunes. Elles mûriront alors en 4 - 5 jours et un bon arôme se développera.
Lorsque le pédoncule se casse facilement du tronc et ne nécessite pas de sécateur, la papaye est bonne à récolter.
Les fruits sont fragiles et doivent être manipulés avec précaution. La meilleure solution est l'emploi de cageots où les papayes ne seront pas superposées. On utilisera du papier journal pour éviter les frottements.
On dispose le pédoncule de la papaye vers le bas afin que le latex coule et la plaie se cicatrise sans tacher la peau du fruit.
N.B. : les données restituées dans cette fiche sont basées sur les résultats obtenus sur les parcelles de papayers à la Station de Recherches Fruitières de Pocquereux (La Foa).