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La médecine traditionnelle kanak

La médecine traditionnelle kanak

La médecine traditionnelle kanak

Cette fiche présente quelques notions de base de la médecine traditionnelle kanak.

La médecine traditionnelle kanak
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    Définition

    Selon l'OMS (organisme mondial de la santé), la médecine traditionnelle « se rapporte aux pratiques, méthodes, savoirs et croyances qui impliquent l’usage à des fins médicales de plantes, de parties d’animaux et de minéraux, de thérapies spirituelles, de techniques et d’exercices manuels – séparément ou en association – pour soigner, diagnostiquer et prévenir les maladies ou préserver la santé ».

    La médecine traditionnelle kanak est millénaire. Bien qu’elle soit aujourd’hui métissée avec les savoirs d’autres cultures présentes en Nouvelle-Calédonie (européenne, asiatique, wallisienne…), elle s’articule autour de deux grands piliers :

    • Les pratiques médicinales familiales qui traitent les petites pathologies de tous les jours ou aident à se maintenir en forme. Ces savoirs sont collectifs et partagés.
    • Les pratiques médicinales liées au surnaturel, au maintien de l’ordre social et spirituel qui entretiennent les liens avec les ancêtres, l’au-delà et soignent les ruptures d’équilibre.  Ces savoirs sont détenus et prodigués par des êtres spéciaux (guérisseurs, devins, sorciers…) et sont secrets.

    La tradi-médecine familiale

    Il existe une multitude de pratiques médicinales et un grand nombre de remèdes différents, propres à chaque famille, aux soins à prodiguer et aux diverses configurations locales (plantes disponibles, habitudes, métissages…).

    De manière générale, ces remèdes et préparations :

    • traitent les petites pathologies quotidiennes : toux, nausées, douleurs…
    • sont préparés avec une ou plusieurs plantes fraîchement cueillies dans le jardin, rarement à partir de matières végétales sèches.
    • sont préparés et dispensés par un proche (transmission orale)
    • sont connus et partagés par un grand nombre de personnes
    • sont spécifiques à chaque étape de la vie : petite enfance, grossesse, allaitement, adolescence…
    • sont considérés comme essentiels pour maintenir un bon équilibre de l’organisme : nettoyer le sang, nettoyer l’appareil digestif (purges), fortifier l’organisme, bien grandir.

    Exemple de médication donnée dès l’enfance à Maré

    Ci-dessous, les noms scientifiques sont indiqués en italique, puis suivent entre parenthèse les noms communs et noms vernaculaires en Nengone (italique également)

    • Le premier médicament donné au bébé est le fruit vert de Morinda citrifolia (Noni, Ikete)
    • La maman donne durant les premières semaines le jus de la feuille grasse de Hoya pottsii (Waikur(i))
    Préparation traditionnelle de l'Aenesheba (fortifiant pour les enfants) © IRD
    Préparation traditionnelle de l'Aenesheba (fortifiant pour les enfants) © IRD
    • Tout au long de sa vie, il est donné plusieurs fois à l’enfant différentes préparations. Certaines sont simples telles qu’une infusion ou un bain de feuilles jaunies de Melochia odorata (Tilleul rose, Thebo). D'autres sont complexes comme le fortifiant appelé Aenesshaba en Nengone, une macération de feuilles et de jeunes pousses d’une trentaine de plantes, parmi lesquelles :
      • Cordyline fruticosa (Cordyline, Ote)
      • Polyscias bracteata (Beku)
      • Acalypha sp (Amakal)
      • Glochidion billardieri (Hmerruwiw)
      • Scaevola sericea (Medekurua)
      • Cassytha filiformis (Goo)
      • Hibiscus tiliaceus (Bourao, Eru)
      • Arocarpus incisa (Guaon)
      • Ficus microcarpa (Banian, Ficus, Tha)
      • Rapanea sp. (Epod)
      • Psidium guajava (Kuava)
      • Olea paniculata (Pengo)
      • Piitosoprum obovatum (Hnuhnu)
      • Morinda myrtifolia (Wabo dridr)
      • Acronychia laevis (Bolé, Bole)
      • Santalum austocaledonicum (Santal, Wekesi)
      • Nothocnide repanda (Anumi xexe)
      • Phyla nodiflora (Ituluo)

    Le corps et l'esprit

    Dans les langues kanak, le vocabulaire qui désigne l’anatomie du corps humain est voisin, voire similaire, du vocabulaire qui désigne l’anatomie des plantes.

    Par exemple, sont désignés par des mots proches : le sang et la sève, la peau et l’écorce, le squelette et le cœur du bois de l’arbre ou encore le pancréas et les feuilles jaunies.

    Outre son corps, une personne possède aussi un esprit qui se déplace dans le monde spirituel. Le corps et l’esprit peuvent se séparer après la mort, ou à l'aide de certaines pratiques magiques. Le monde spirituel est peuplé d’esprits ancestraux et d’êtres surnaturels, les ya’ac (sortes de dieux ou génies, lutins ou ogres), qui ont diverses formes : un être humain (c’est le cas de lutins), un animal (la tortue totem d’un clan par exemple), un rocher, un lieu, un événement météorologique.

    Ces esprits sont toujours la propriété d’un clan, à qui ils apportent une protection.  Certains êtres surnaturels sont farceurs, d’autres sont gentils, d’autres sont méchants et punissent ceux qui enfreignent l’interdit.                                                                                                                                                                                                                                                         

    Rupture d'équilibre

    De manière générale, la maladie reflète la rupture d'un équilibre. Elle peut être liée à un conflit (collectif ou personel), la violation d'un tabou ou d'une chose sacrée.

    Même si la cause d’un mal est rapidement identifié, comme une blessure par accident, les causes "réelles" sont recherchées et soignées en parallèle, à l'échelle de l'individu ou de la communauté : quel est le conflit sous-jacent ? quelle interdit a été bafoué ? Quel esprit ou quelle famille vous a jeté un sort ?

    Le traitement par la magie est pratiquée à l’aide de petits paquets ficelés, les waceng, contenant des plantes spéciales, une pierre, des phanères (poils, cheveux, cils, ongles) ou un os.

    La magie destinée à faire la guerre, tuer ou être néfaste à d’autres personnes, appelé kaze, équivaut dans d’autres cultures à la magie noire, la sorcellerie ou le « boucan ».  

    Les tradithérapeutes

    Les guérisseurs et guérisseuses traditionnels ou tradithérapeutes sont capables d'identifier l'origine réelle d'un problème et interviennent dans le règlement des conflits. Leurs savoirs sont généralement transmis de génération en génération au sein du clan. Ils sont connus et réputés lorsque leurs remèdes sont efficaces. Les tradithérapeutes ont des spécialités :

    • certains fabriquent les médicaments
    • d'autres jètent un sort
    • d'autres intéragissent avec les esprits
    • certains sont capables de soigner des fractures ou l'extraire un bout d'os ou de corail dans le corps

    Les guérisseurs utilisent leur don de voyance ou leur aptitude à communiquer avec les esprits ancestraux ou les dieux.

    La phytothérapie s'accompagne de rituels et de prières.

     

    Référent / Contact

    Estelle VIDAL
    Communication scientifique
    Lincks
    Mis à jour le 25/11/2024
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